On n'a pas voulu me croire. Je jouais soi-disant les oiseaux de mauvaises augures. En réalité mon rôle s'apparentait plus à celui de Cassandre, même si je ne me savais pas avoir commis de crime de lèse-divinité pour mériter ce sort. Si je n'avais pas été aussi déçue, j'en aurais presque ri. Jaune. De cette satanée ironie. Moi qui savais pertinemment qu'on se berçait d'illusions, moi qui avait tenté de les dissuader, voulant éviter un massacre hautement prévisible, puis qui, finalement, devant l'enthousiasme général, s'était convaincue d'y croire aussi, afin de ne pas dénaturer ce bel optimisme. Après tout, qui sait, si on y croyait, peut-être que cela deviendrait possible.

Bam.

La réalité. En pleine face. Indiscutable. Et même un petit peu plus noire que prévue, comme pour se venger qu'on ait pu croire y échapper, même sur un sujet aussi insignifiant.

« Personne ne s'amuse. »

Nan, tu as raison, personne ne s'amuse. Mais tu as de la chance si tu le découvres seulement maintenant. Car il y a bien longtemps, pour ma part, que je ne m'amuse plus. Est-ce à cause de cela que je joue ? Qui sait ? Ca me tuerait, tout de même. De savoir que même ça, tu en es à l'origine. Un peu plus et je croyais au déterminisme, avec toi comme unique cause de tous mes comportements. Le pire est sûrement que je me sens être dans le vrai, et ça m'horrifie.